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Catégorie 37 : Le droit d'emmerder Dieu
Catégorie 37 : un livre dont le titre ne comporte pas la lettre A
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Quatrième de couverture : « C’est à nous, et à nous seuls, qu’il revient de réfléchir, d’analyser et de prendre des risques pour rester libres. Libres de nous engager et d’être ce que nous voulons. C’est à nous, et à personne d’autre, qu’il revient de trouver les mots, de les prononcer, de les écrire avec force, pour couvrir le son des couteaux sous nos gorges.
À nous de rire, de dessiner, d’aimer, de jouir de nos libertés, de vivre la tête haute, face à des fanatiques qui voudraient nous imposer leur monde de névroses et de frustration – en coproduction avec des universitaires gavés de communautarisme anglo-saxon et des intellectuels qui sont les héritiers de ceux qui ont soutenu parmi les pires dictateurs du XXe siècle, de Staline à Pol Pot. »Voici donc la plaidoirie de Maître Richard MALKA, avocat de Charlie Hebdo, lors du procès des attentats de janvier 2015.
Personne ne peut oublier les effroyables attentats du 7 janvier 2015, contre le journal satirique Charlie Hebdo et l'hyper Cacher de la porte de Vincennes… Nous avons tous été submergés par un tsunami d’émotions qui a déferlé sur notre territoire avec « je suis Charlie » : un élan commun pour la liberté d’expression, le libre-arbitre et le droit à la différence.
Le livre commence sur une genèse des caricatures de Salman Rushdie, en évoquant notamment le court métrage Submission, de Theo Van Gogh cinéaste et réalisateur assassiné le 2 novembre 2004 aux Pays-Bas, puis le père Hamel, prêtre catholique français, égorgé par dix-huit coups de couteau, à Saint Etienne du Rouvray le 26 juillet 2016….
« Qui a blasphémé, si ce n’est les Frères Musulmans qui ont inventé, créé et diffusé ces caricatures ? Ce sont eux les blasphémateurs. Alors, oui, c’est dur d’être aimé par des cons, comme le disait Cabu en parlant des intégristes, mais c’est encore plus triste d’être instrumentalisés par des escrocs. »
Alors pourquoi porter de tels coups à la France ? Tout simplement « parce que la France a une histoire particulière. Parce que c’est le premier pays au monde à avoir aboli le délit de blasphème. Parce que c’est ce pays qui a apporté au monde l’idée de la libre critique de la religion. Et parce que c’est Charlie, parce que nous avons une histoire particulière qui ne pouvait nous conduire qu’à assumer pleinement notre procès. Alors je vais vous raconter ces deux histoires. Celle du blasphème et celle de Charlie. »
L’auteur remonte le cours de l’Histoire pour nous expliquer les mécanismes de ces massacres, pour en mesurer la profondeur, pour en sonder la noirceur. Car il est bien évident que le mobile de ces crimes est motivé par une « certaine vision » de l’Islam.
La plaidoirie de Richard MALKA s’appuie sur des argumentations :
- historiques : si en 1789, le délit de blasphème est supprimé, ce n’est qu’en 1881 que la liberté de la presse verra le jour,
- philosophiques avec les apports fondamentaux des Encyclopédistes du siècle des Lumières, de leur esprit critique et de leur raison,
- juridiques avec le droit et la liberté d’expression,
- idéologiques et ceci, sans jamais aborder la religion.
Le discours est bien construit, richement documenté et souvent emprunt de tendresse pour ses amis disparus. Charlie, ce fut « une aventure incroyable de quelques électrons libres, anticonformistes, qui ont fini par écrire un bout de l’Histoire de France alors que c’était les derniers à en avoir l’ambition. »
Richard MALKA s’insurge contre l’obscurantisme : il n’y a pas de justification aux meurtres d’innocents. Et se taire, « ce serait renoncer à l’indomptable liberté humaine pour vivre enchaînés ». Car toute idée doit être confrontée et débattue. L’absence de doute caractérise le fanatisme et l’idolâtrie. « Aucune croyance, aucune idée, aucune opinion ne peut exiger de ne pas être débattue, critiquée, caricaturée.»
Parce que ce procès n’est que celui de la liberté d’expression, précieuse et à protéger, au nom de nos valeurs républicaines.
« La liberté de critique des idées et des croyances, c’est le verrou qui garde en cage le monstre du totalitarisme. »
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Richard Malka, né le 6 juin 1968 à Paris, est un avocat français, connu notamment pour être l'avocat de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo. Il est aussi scénariste de bandes dessinées et romancier. (Wikipedia)
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Pour en savoir plus :
Attentats de janvier 2015 en France (Wikipedia)
Le procès des attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher s'ouvre à Paris (Agence Reuters)
L'Encyclopédie de Diderot et d’Alembert (Gallica)
Richard Malka, l'avocat de Charlie Hebdo remonte aux origines de l'islam - L'invité de Sonia Deville
Maître Richard Malka : "Il faut dénoncer les idéologies totalitaires"
Chroniques d'une guerre sans fin, entretien avec l'avocat Richard Malka (France Culture)
1881 : quand la IIIe République instaure un droit au blasphème (France Culture)
Tags : charlie, liberte, expression, libre arbitre